« Auto-satisfecit, des annonces qui ne convainquent personne; de fausses surprises promises à la population » commente l’analyste.
Au VIIIè Sommet des chefs d’État et de gouvernement des Amériques, qui s’est tenu à Lima, capitale du Pérou, du 13 au 15 avril 2018, le thème central a été l’avenir des Nations de la région : « la gouvernance démocratique face à la corruption ». Le président Jovenel Moise, à la tête d’une forte délégation, a pris la parole et par acclamation a adopté « l’Engagement de Lima » à l’instar des 33 autres dignitaires présents au forum. L’analyse de son discours du 14 avril 2018 à Lima, est faite à partir de « ses propres paroles », par Michelle Mevs, dans un texte publié mercredi matin dans l’hebdomadaire Haïti-Observateur.
Port-au-Prince, mercredi 18 avril 2018 ((rezonodwes.com))-Le président haïtien, Jovenel Moïse, a commencé ainsi son allocution : « Ce huitième Sommet des Amériques, auquel je suis ravi de participer …», dit Jovenel Moïse.
Notons à partir du discours du président et en ses propres termes, l´auto-satisfecit qu‘il s’octroie pour sa gestion, ainsi que des reprises non convaincantes tout en élaborant quelques points-surprises vides de sens.
D´une part, l´auto-satisfecit. Et le président haïtien dit : « Car l’ensemble du peuple haïtien a identifié la corruption comme le mal auquel les dirigeants doivent s’attaquer (…) [Je (Jovenel Moïse ) l’ai déjà dit :] Depuis mon accession au pouvoir le 7 février 2017, je n’ai cessé d’exprimer ma vision d’une société haïtienne libérée de la corruption(…) Je suis animé de la volonté de marquer, de façon irréversible, les indispensables ruptures pour faire place au développement endogène du pays; (…) S’il est un fait dont nous pouvons être fier dans notre région, c’est le triomphe des valeurs de la démocratie représentative; (…) Pour mener à bien cette lutte, Haïti dispose de tout un arsenal juridique et institutionnel, composé de l’Unité de lutte contre la corruption (ULCC) et l’Unité centrale de renseignement financiers (UCREF) et de la loi portant sur la Prévention et la répression de la corruption de 2014 ».
Et M. Moïse d’ajouter : « Il reste toutefois du chemin à parcourir, des réformes importantes à engager, dans le domaine de la justice et de l’État de droit, particulièrement, mais aussi dans le système électoral dont la faiblesse est porteuse de crises politiques récurrentes.(…)La sensibilisation et la prévention sont donc aussi des stratégies incontournables de lutte contre la corruption. Ma délégation se félicite qu’ elles soient incluses dans le projet d’engagement. Pour ce faire, l’information doit être accessible à la population».
Rien de convaincants, comme des défis lancés au pays
« De profondes réformes sont nécessaires et sont désormais engagées en Haïti (…)» dit le président Jovenel Moïse.
Au sujet de la sécurité publique, Jovenel Moïse parle du « Le banditisme et les crimes organisés». Il fait le le parallèle entre la disparition de journalistes à la frontière Equateur-Colombie. Profitant de l’occasion pour présenter ses sympathies et dit : «Nous sommes en train de vivre des moments difficiles aussi en Haïti avec la disparition d’un journaliste haïtien depuis près d’ un mois. [sans nommer le journaliste Vladjimir Legagneur disparu à Grand-ravine] avec le peuple équatorien et au président Lenin, suite à l’assassinat de deux journaliste équatoriens ».
Sécurité publique : « Nos efforts ont porté aussi sur le renforcement de la sécurité publique, par l’amélioration continue des capacités de la Police nationale d’Haïti et le rétablissement des Forces armées d’Haïti en vue de nous aider dans la lutte contre la contrebande».
Abordant la question de « la gouvernance démocratique face à la corruption». Séparant le mode de GOUVERNANCE d´avec le concept de “démocratie”, le président haïtien dit :
GOUVERNANCE
Citons ici, à titre d’exemples, les différents scénarios que Jovenel Moise transforme dans son discours en des points majeurs. Nous citons donc :
« Le renforcement de la capacité de la Commission nationale de marchés publics; l’élimination de l’absentéisme au sein de l’administration publique entraînant la récupération d’un nombre considérable de chèques émis en faveur de fonctionnaires absentéistes; l’organisation systématique de concours pour le recrutement de jeunes cadres en vue de redynamiser la fonction publique. Mais encore, la révision des procédures de passation de marché pour l’établissement de prix de référence en vue de contrecarrer la surfacturation des contrats; (…) à mettre en place des mécanismes visant la vulgarisation de la culture de reddition de compte et de la transparence, principalement dans les sphères de l’administration publique. De même, nous avons entamé avec détermination la réforme générale de l’administration pu bli que en vue de moderniser nos institutions.
« Le pays commence à récolter le fruit de ces actions. Depuis mon arrivée au pouvoir , le coût des travaux réalisés par l’État a été, dans certains cas, divisé par dix. L’exécution de travaux en régie et la mise en valeur des ressources humaines, matérielles et financières de l’État a permis de faire des économies consistantes ». Mais encore, dit-il : « J’entends poursuivre sur ce chemin pour le reste de mon quinquennat ».
Sous la rubrique démocratie, Jovenel Moïse explique:
« Les états généraux sectoriels de la nation que je viens de lancer participent de cet effort pour encourager un dialogue citoyen sur toutes ces questions et parvenir à l’adoption d’un pacte national qui responsabilise l’ensemble de la société sur les choix à faire et les implications à assumer tant individuellement que collectivement. »
APPAREIL JUDICIAIRE : «En tant que garant de la bonne marche des institutions de l’État, j’ai pris des mesures visant à garantir l’indépendance et à accroître l’efficacité de l’appareil judiciaire». Notons qu’un rapport d’enquête sur la surfacturation de kits scolaires est attendu depuis octobre 2017.
Les points-surprises
Dans la lutte contre la corruption, notons le discours du président haïtien; or la partie est loin d’être gagnée quand la confiance est vacillante.
Et le président Jovenel Moïse de dire : « Nous déploierons tous les efforts nécessaires en vue d’aboutir à la consolidation des structures opérationnelles chargées de la lutte contre la corruption».
Mais encore, il ajoute : « (…) au recouvrement des biens et avoirs détournés ou acquis de façon illicite; à l’éradication de l’impunité et à l’amélioration du cadre légal. Je prône que les États victimes doivent avoir accès plus rapidement aux biens et avoirs récupérés».
« (..) Ma vision s’est matérialisée dans la stratégie du gouvernement faisant en sorte que les ressources de l’État soient consacrées au bien-être de la population». Et Jovenel Moïse poursuit : «Ma délégation se félicite qu’ elles soient incluses dans le projet d’engagement. pour ce faire, l’information doit être accessible à la population».
Un engagement ferme contre la corruption
Les dirigeants présents au Sommet des Amériques, à Lima, ont approuvé, samedi, par acclamation, un « engagement » ferme contre la corruption. Le document du 14 avril 2018 porte sur la question de la transparence dans la gestion du gouvernement.
Les principaux points de l‘ « Engagement de Lima », intitulé « Gouvernance démocratique face à la corruption » sont les suivants :
- Promouvoir l’adoption et/ou le renforcement des mesures législatives nécessaires pour criminaliser de manière pénale les actes de corruption;
- Promouvoir l’utilisation de systèmes électroniques sur les achats publics, la passation de marchés de services et les travaux publics afin d’assurer la transparence ;
- Adoption et/ou renforcement des mesures qui favorisent la transparence, la responsabilité, la bonne comptabilité (reddition de compte) et le dépôt en banque des revenus et des dépenses des organisations et des partis politiques, concernant principalement les campagnes électorales;
- Consolider l’autonomie et l’indépendance des organismes de contrôle supérieurs;
- Protéger les lanceurs d’alertes : dénonciateurs, les témoins et les informateurs contre les actes de corruption face à des actes d’intimidation et de représailles ;
- Protéger le travail des journalistes et des personnes qui enquêtent sur les cas de corruption;
- Protéger les fonctionnaires impliqués dans l’application de la loi, enquêter, poursuivre et punir les actes de corruption;
- Mettre en œuvre des mesures pour réduire la bureaucratie et simplifier les procédures à tous les niveaux de gouvernement pour la prévention de la corruption.
A relire ici l’intégralité du texte lu par le président Jovenel Moise, au Sommet des Amériques.
Michelle Mews
(extrait de l’édition du 18 avril de Haïti-Observateur)